Le changement climatique a augmenté les précipitations associées aux cyclones tropicaux, lesquels touchent des communautés très vulnérables à Madagascar, au Mozambique et au Malawi.
Madagascar, le Mozambique, le Malawi et les pays voisins ont subi de graves inondations après qu’une série de tempêtes tropicales, dont trois cyclones qui ont frappé la région, à commencer par les tempêtes Ana et Batsirai en janvier et février 2022. La tempête tropicale Ana, survenue fin janvier 2022, a provoqué des vents, de fortes pluies, des dégâts et des destructions dans certaines parties de Madagascar, du Mozambique, du Malawi et du Zimbabwe. Après la tempête Ana, le cyclone tropical Batsirai a frappé la côte sud de Madagascar le 5 février 2022. Les tempêtes Ana et Batsirai ont été les premières de la saison cyclonique 2021-22 du sud-ouest de l’océan Indien (novembre-avril).
À la suite de ces deux événements, deux autres cyclones tropicaux et une autre tempête ont également frappé, provoquant de nouvelles inondations et augmentant le nombre de personnes touchées et de victimes. Ana et Batsirai ont eu de graves conséquences humanitaires à Madagascar, au Mozambique et au Malawi, notamment des morts et des blessés, des dommages aux infrastructures et toute une série d’impacts socio-économiques durables qui se feront sentir encore davantage au début du processus de redressement.
Ces effets sont principalement dus à la quantité de pluie et aux inondations provoquées par ces deux systèmes. Fig1. Précipitations moyennes sur 3 jours [mm/jour] pour Ana (gauche) et Batsirai (droite) dans ERA 5Des scientifiques du Mozambique, d’Afrique du Sud, de Madagascar, de Nouvelle-Zélande, d’Inde, des Pays-Bas, de France, des États-Unis d’Amérique et du Royaume-Uni ont collaboré pour évaluer dans quelle mesure le changement climatique causé par l’homme modifie la probabilité et l’intensité des fortes précipitations associées aux cyclones.
À l’aide de méthodes publiées et évaluées par des pairs, nous avons analysé comment le changement climatique induit par l’homme a affecté les précipitations maximales annuelles moyennes sur trois jours dans les régions les plus touchées par Ana et Batsirai. Conclusions principales.
Les inondations sont à l’origine de la majorité des effets. Nous évaluons donc les précipitations associées aux tempêtes tropicales, exprimées par le maximum annuel sur trois jours. Il s’agit d’une mesure suffisamment courte pour exclure les précipitations provenant d’autres événements qui se produisent à proximité de l’événement en question, mais suffisamment longue pour englober l’ensemble des impacts. Madagascar, le Malawi et le Mozambique avaient tous connu des inondations dans les semaines précédant Ana, et les communautés touchées par ces inondations étaient extrêmement vulnérables à tout autre risque, en particulier à un risque qui aggravait les situations d’inondation existantes -les tempêtes tropicales consécutives ne laissent pas suffisamment de temps aux gens pour se relever avant l’arrivée d’une autre tempête.
Les conditions sous-jacentes de conflit (nord du Mozambique) et de sécheresse (sud de Madagascar) ont probablement accru la vulnérabilité. Actuellement, Madagascar est aux prises avec une situation d’insécurité alimentaire extrême, due à une série de conditions socio-économiques et à une sécheresse prolongée.
La tempête tropicale Ana et le cyclone Batsirai ont été bien prévus et suivis, notamment par Météo Madagascar et le Centre Météorologique Régional Spécialisé. En revanche, l’existence d’avertissements ne garantit pas que ces avertissements soient reçus et pris en compte. Par ailleurs, dans certaines régions, les dommages causés aux structures de communication et aux réseaux électriques ont entravé la réception des alertes.
D’un point de vue météorologique, l’événement (défini dans ce cas comme la moyenne maximale des précipitations sur 3 jours) n’a été extrême que pour le premier cyclone, Ana, avec une période de retour d’environ 1 sur 50 ans sur le Malawi et le Mozambique. Batsirai n’était pas un événement isolé, ayant une fréquence d’environ 1 an sur 2 sur Madagascar. Les observations relatives aux précipitations dans la région sont rares et contiennent de nombreux cas de données manquantes, par conséquent une évaluation quantitative des tendances est entachée d’incertitudes. Toutefois, d’un point de vue qualitatif, notamment en tenant compte des stations météorologiques individuelles, on peut observer une augmentation de la probabilité et de l’intensité des fortes précipitations associées à ces cyclones tropicaux.
En vue de déterminer le rôle du changement climatique dans ces modifications observées, nous combinons les observations avec les modèles climatiques. Nous constatons que les émissions de gaz à effet de serre et d’aérosols sont (au moins en partie) responsables des augmentations observées.Ces résultats sont cohérents avec les projections futures de fortes précipitations associées aux cyclones tropicaux, ce qui corrobore la conclusion d’attribution selon laquelle le changement climatique a effectivement augmenté la probabilité et l’intensité des précipitations associées à Ana et Batsirai.