Nord-Kivu : les forêts du Nord-Kivu périssent alors que la solution existe ! Pourquoi ? Un panel du Journaliste John TSONGO

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Cet article a été publié pour la première fois sur PANARADIO (radio panafricaine)

La ville de Goma (province du Nord-Kivu en RDC) a accueilli ce samedi 17 Septembre 2022, sa toute première édition environnementale dénommée « Expo vert ». L’objectif était, selon Glody TAMBWE coordonnateur de la commission de son organisation, sensibiliser les différents acteurs à s’approprier les questions liées aux enjeux environnementaux, s’approprier la lutte contre la pollution, en vue d’obtenir d’ici 2030, une ville de Goma « Zéro déchet ». Au cours de cette activité qui a vécu dans les enceintes du stade paralympique en plein cœur de la ville, plusieurs thèmes ayant trait au réchauffement climatique, le plantage d’arbres, les enjeux de l’exploitation du pétrole,… ont été au rendez-vous.Pendant ce temps, le Journaliste environnementaliste John TSONGO, membre de la plateforme Africa 21, regroupant un réseau des journalistes Africains amis de l’environnement ; a été invité comme panéliste. Il a centré son exposé autour du thème :« IMPACT DE LA NON EXPLOITATION DU GAZ METHANE DU LAC-KIVU SUR LES ECOSYSTEMES FORESTIERS DU NORD-KIVU »Voici ci-dessous, l’intégralité de la matière qu’il a offerte à ceux qui ont pris part à cette édition de l’environnement.

Brève présentation du lac-Kivu

Photo prise par Déodat BAHATI

Avec plus d’1,5 millions d’habitants, la ville de Goma est située entre le parc national des Virunga au Nord, et le lac Kivu au Sud. D’une superficie de de 2 412 km², et d’une profondeur de plus ou moins 275 m, le Lac Kivu se situe à une altitude de 1 462 m au-dessus du niveau de la mer et ses bassins-versants environnants peuvent atteindre une altitude maximale de 4 507 m. Ses profondeurs moyenne et maximale sont respectivement de 240 m et de 485 m. Il est divisé par la grande île Idjwi (279 km²) et contient plus 560 milliards de m³ d’eau.

Potentiel en gaz du Lac Kivu

Dans un document de 1958, intitulé je cite : « Données pour la mise en valeur du gisement de méthane du lac Kivu », Georges Borgniez Ingénieur a.i. (ad intérim) et conseiller à la régie de distribution d’eau et d’électricité du Congo et du Rwanda-Urundi avait dégagé des valeurs approximatives en gaz dans le Lac-Kivu sont variables:

  •  270 milliards de m3 d’anhydride carbonique (CO2) ;
  • 61 milliards de m³ de gaz méthane (CH4) ;
  • 1 milliard de m³ d’hydrogène sulfuré (HgS) correspondant à 1,4 million de tonnes de soufre ;
  • 10 milliards de m³ d’azote (Nj) ;
  • 10 millions de tonnes de phosphates ;
  • 455 millions de tonnes de sels divers : de soude, de potasse, de magnésie et de chaux.

Les études ont par ailleurs démontré que dans la mesure où ces trois derniers gaz seraient ramenés à la surface du lac, ces eaux de profondeur dégageraient naturellement environ (aux conditions locales) :

  • 190 milliards de m³ de CO2 ;
  • 57 milliards de m³ de gaz méthane CH4 ;
  • 4 milliards de m³ de Ng.

Potentiel énergétique du Lac Kivu

Si les prévisions des experts sont respectées, le Lac-Kivu pourrait générer jusqu’à 500 MW d’électricité en une quarantaine d’années.
Et cette énergie pourrait permettre à la RDC de relever ses principaux défis économiques, notamment celui de l’industrialisation. La RDC a tout intérêt d’accroître considérablement sa production d’électricité pour se rassurer que d’un côté elle fait face au faible taux d’électrification de son territoire, ce qui affecte son domaine industriel, et de l’autre, elle endigue la coupe du bois en amenant sa population au point de migrer de l’énergie fossile vers les énergies renouvelables. Cela lui permettrait également de sauvegarder ses forêts.

La question de dénudation des sols autour du bassin du Lac-Kivu semble ne plus être d’actualité, en ce simple sens que ses forêts subissent une pression démographique qui semble ne pas attirer l’attention de plusieurs…
Pourtant, le président du comité exécutif de l’ONG congolaise Environnement sain sans frontière (ESSF), Monsieur Alain Botoko cité par Arthur Malu-Malu, mentionnait déjà dans un article publié à 2019, autour du gaz du lac Kivu, qu’Il n’y avait plus de forêt autour du lac Kivu, « car les riverains coupent du bois de manière excessive pour leurs besoins domestiques ».

Le gaz butane, cette autre ressource non exploitée du Lac-Kivu.

Le butane est un gaz qui est spécialement destiné pour un usage intérieur, notamment pour l’alimentation d’une gazinière, un four ou une plaque de cuisson. La bouteille de gaz butane est un produit incontournable en cuisine pour le chauffage d’appoint.Depuis l’époque coloniale entre 1958 et 1960, les Belges ont tenté de mener des études perspectives d’exploitation du gaz du Lac-Kivu et ont évalué à une dizaine de milliers de dollars, les investirent qui pourraient aboutir à ce genre de projet.C’est vers 2014, que la RDC tente de lancer le dégazage, notamment au golf de Kabuno, mais les résultats peinent toujours à convaincre.Cette étape de Kabuno arrivait, juste après qu’en novembre 2015, la RDC et le Rwanda avaient conclu un accord pour exploiter conjointement la ressource et en partager les bénéfices. L’accord prévoyait également des mesures de sécurité qui devaient accompagner la mise en œuvre de ce projet ambitieux.Et curieusement depuis lors, les choses semblent n’avoir pas suffisamment avancé coté RDC.Finalement en février 2019, le Rwanda a conclu un accord de production du gaz butane en bouteilles à partir de la ressource du lac Kivu, avec la société Gasmeth Energy, constituée par des hommes d’affaires américains, nigérians et rwandais. Mais dans l’entretemps coté RDC, les choses sont au statut quo. En 2021, dans les moments post éruption, une gamme de délégations ministérielles ont effectué beaucoup de tournées à Goma pour statuer autour de la question de l’exploitation du gaz, mais aujourd’hui, rien ne filtre et la déforestation s’est pas arrêtée.Pourtant, les annonces faisant foi de l’exploitation du gaz méthane ont suscité de l’espoir dans le chef tant des riverains du Lac-Kivu que des défenseurs environnementaux, qui estimaient déjà qu’avec la production et la réduction du prix du gaz butane, contribuerait pour beaucoup, à la diminution sensible de la demande en braise, ce qui déconcentrerait les bastions de carbonisation dans les écosystèmes forestiers de la province.Place et apport du gaz butane dans nos cuisines.Un mètre cube de gaz méthane renferme 2.51 kg/m³ butane.Les 61 Milliards des réserves en gaz méthane du Lac-Kivu, sont, partant des simples calculs, susceptibles de produire autour 15 311 000 000 000 (Quinze millions trois-cents onze milles milliards) de kg de gaz butane à utiliser dans les cuisines congolaises et plus directement par les riverains du bassin.D’après les études de 2020 menées par l’autorité du bassin du Lac-Kivu et de la Ruzizi ABAKIR, les populations riveraines du bassin du Kivu sont estimées à 11 millions d’habitants, dont 6,8 millions d’habitants en RDC soit (62 %), 2,5 millions au Rwanda soit (23 %) et 1,7 million au Burundi soit (15 %).Avec tout ce potentiel gazier, le problème de la déforestation serait en quelque sorte résolu, d’amblée par la disponibilité du gaz et sa facile accessibilité par les citoyens ordinaires.Impact de la non exploitation du gaz butane sur les écosystèmes du Nord-Kivu.

1. De l’usage de la braise

La ville de Goma consomme chaque semaine qui passe, Chaque semaine qui passe, près de 28 tonnes de la braise. C’est un équivalent de 146 gros arbres, c’est-à-dire plus ou moins 1 hectare d’arbres coupés par semaine suite à la carbonisation, pour alimenter cette ville touristique Goma en énergie de cuisson.
Ces projections, nous les avons faites en 2020, lors d’une étude que nous avons menée auprès de l’association de Vendeurs et exploitants des ressources forestières et Agro-pastorales AVERFA et dont les résultats sont couchés dans un article publié sur radiomoto.net

2. Du faible taux d’accès à l’électricité

Dans un article écrit en Novembre 2021 par moi-même et publié sur radiomoto.net, je démontrai que Faute d’une politique inadaptée ou inexistante, la RDC perdait en cascade des vastes étendues de ses forêts. Cette déforestation est imposée par la carbonisation entretenue par des populations soit par la recherche de la braise, soit des planches ou par les formes diverses d’exploitation du bois, aux travers des marchés passés aux étrangers, sans beaucoup de clarté; ou encore en grande violation des lois environnementales qui régissent ce secteur au pays.Selon les données de l’organisation mondiale pour l’alimentation FAO, 311 000 hectares des forêts Congolaises sont détruites chaque année, depuis 1990. Egalement, dans un rapport du ministère de l’environnement parvenu à l’agence congolaise de presse « ACP » l’an 2010, l’on notait qu’entre 2000 et 2010, la RDC avait perdu plus de 350 milles hectares de ses forêts. Loin de là, la RDC avait perdu environ 484 milles d’hectares des forêts, en 2018, selon un reportage réalisé par la voix de l’Amérique Kiswahili, en octobre 2021, sur la spoliation des parcs nationaux.Dans la même optique, le ministère de l’environnement avait, en 2010, alerté que si rien ne se faisait en terme de précautions, la RDC perdrait entre 12 et 13 millions, de ses 145 millions d’hectares des forets d’ici 2030.Toutes ces données qui présentent un tableau opaque en défaveur des forêts congolaises, expriment une pure nécessité de la mise en route d’une nouvelle politique de gestion forestière pour ne pas courir le risque de la désertification dans les temps les plus proches de ce pays, malgré son immense potentiel forestier.4. Des évidences interpellatricesAujourd’hui, une bouteille de 12 kg de gaz butane coute 22 USD, un sac de la braise coute entre 22 et 30 USD, un tas de la braise varie entre 200 et 1000 FC, un paquet de 10 kw revient à 5 USD.Un réchaud électrique coute entre 20 et 50 USD, un réchaud à gaz coute entre 50 et 160 USD, alors qu’un brasero coute entre 1 et 10 USD.

5. Des pistes de solution

L’Etat Congolais doit asseoir une bonne politique énergétique, qui réponde au pouvoir d’achat du citoyen ordinaire, par la mise en route d’un tarif pro-pauvre d’accès à l’énergie. Le gouvernement doit accélérer le processus d’exploitation du gaz pour que ce dernier cesse d’être un danger, mais une opportunité de lutte contre la déforestation. Il doit implanter les usines de fabrication des bouteilles à gaz et réduire leurs prix en les adaptant au niveau de vie de la population.

John TSONGO

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