Les femmes déplacées du camp de Bulengo se sont engagées dans la fabrication de briquettes écologiques et s’opposent à l’exploitation du pétrole dans les blocs pétroliers du Nord-Kivu. ALLEN+ et ActionAid sensibilisent ces femmes déplacées de guerre sur la justice climatique, dans le cadre de la clôture de la semaine sur cette thématique.
Des messages de paix ont été brandis par ces femmes, exprimant leur désespoir face à la situation de guerre et leur désir de retour à la paix. On pouvait voir ici et là des appels à l’action destinés aux autorités, écrits sur des calicots et des morceaux de papier en kiswahili, en français et en anglais. “Donne-moi la paix, je rentre chez moi”, “Nipe Amani nirudie kwangu”, “Tunaomba Amani”, “Nous voulons la paix”, “Napenda nirudi kwangu kwani nachoka na mateso” (J’aime rentrer chez moi car je suis fatiguée de souffrir). Plusieurs slogans en faveur de la paix et de la protection de l’environnement ont été lancés par les participants.
Des jeux et des danses ont été initiés pour aider à guérir les stress et traumatismes causés par la guerre, apportant un sourire sur les visages de personnes souvent oubliées par l’humanité.
Le feu, destructeur des champs
NatureLCD a accueilli Madame Rosy Akyombo, coordinatrice de projet chez ActionAid/Goma, ainsi que de jeunes activistes pour le climat regroupés au sein de ALLEN+. Elle a rappelé que, avec la multiplication des activités humaines, la terre n’est plus productive et a exhorté les participants à ne plus mettre le feu dans les champs pour préserver la biodiversité et les engrais naturels. “Nous sommes dans une zone de production de choux et de pommes de terre, notre terre est pleine d’engrais naturel. En retournant chez vous, veillez à ne pas utiliser de feu dans vos champs. Le feu détruit nos terres, appauvrit le sol et le rend improductif”, a-t-elle déclaré.
Les participants ont pris l’engagement de ne plus pratiquer la culture sur brûlis, étant conscients que cela contribue à la perte de la biodiversité et des engrais naturels dans leurs champs.
Le gaz méthane du lac Kivu, un danger pour les déplacés du camp de Bulengo
Situé près du Mont Nyiragongo et du lac vert contenant une grande quantité de gaz méthane, le camp de Bulengo présente un risque constant pour ses habitants. Madame Rosy a souligné les défis auxquels sont confrontés les habitants et a appelé chacun à la vigilance. “Vous voyez bien que la position de ce camp ne vous permet pas de circuler librement. Partout, il y a des interdictions de passage, car cet endroit est rempli de gaz méthane, un danger pour toute personne souhaitant agir sans précaution. Nous devons protéger notre environnement. Si nous ne coupons pas d’arbres, nous permettrons à notre communauté de mieux respirer. Arrêtons de couper du bois de chauffage dans le parc ou dans notre environnement”, a-t-elle déclaré.
Daniel Musafiri, coordinateur de ALLEN+ et jeune activiste, a insisté sur le fait que la question climatique concerne tout le monde. “Nous avons voulu impliquer les déplacés de guerre car le réchauffement climatique affecte aussi l’agriculture et l’alimentation. En cette période de déplacement, nous avons constaté une coupe excessive d’arbres. Nous avons voulu que les déplacés participent à cette lutte, malgré la crise. Notre message ici est un appel à la paix et à la justice climatique.”
Quid de la justice climatique
Les riverains souffrent souvent dans l’ignorance des lois et des accords pris par les décideurs politiques lors des conférences sur le climat. Ces activistes pour le climat partagent leurs expériences avec les paysans, qui n’ont souvent jamais bénéficié des richesses de leurs terres, une fois exploitées. Daniel Musafiri a déclaré : “Nous voulons parler de la justice climatique pour responsabiliser les acteurs impliqués. Le gouvernement congolais doit s’occuper des victimes du changement climatique, y compris les réfugiés climatiques. Cette activité vise à éveiller les consciences pour un changement vers un monde plus durable.”
Chaque année, plus d’un hectare de terres agricoles est récupéré par des hommes d’affaires et des opérateurs économiques en RDC, sans que personne n’intervienne. La population victime de cette occupation illégale doit être protégée. “La loi congolaise exige que ceux qui exploitent des ressources comme le pétrole ou l’or indemnisent les victimes en leur versant des compensations”, a ajouté un activiste environnemental.
Les briquettes écologiques : une réponse face au changement climatique
Assainir la ville est un devoir collectif. Rendre l’environnement sain et lutter contre la déforestation est un engagement pris par les femmes déplacées du camp de Bulengo à l’occasion de la clôture de la semaine sur la justice climatique. Face à la violence et aux pillages fréquents dans la région, ActionAid, en collaboration avec ses partenaires, a formé ces femmes à la fabrication de briquettes écologiques à partir de déchets plastiques.
Madame Bahiye Clémentine, formatrice, a indiqué que cette formation vise à améliorer le niveau socio-économique de ces femmes. “Les briquettes fabriquées à partir de déchets ménagers sont écologiques et ne polluent pas l’environnement. Les femmes qui suivent cette formation n’auront plus à dépenser beaucoup d’argent pour se procurer du bois de chauffage. Ce programme vise à autonomiser les jeunes filles et les femmes, afin qu’elles n’aient plus à s’aventurer dans le parc ou la forêt”, a-t-elle précisé.
Les participantes ont exprimé leur joie face à l’importance de cette formation. Ester Haganze a partagé son expérience : “Je suis ravie d’apprendre ce métier qui m’aidera à subvenir aux besoins de ma famille. Je ne chercherai plus de bois dans le parc, je vais vendre ces briquettes et gagner de l’argent.”
De son côté, Ndabuhe Monika, victime de violences dans le Nyiragongo, a exprimé sa gratitude envers ActionAid. “Cette formation va changer ma vie. J’ai beaucoup souffert depuis notre déplacement de Masisi à Goma. J’ai perdu mon mari et je me retrouve seule avec mes 8 enfants. Grâce à ActionAid, je reprends le sourire et je vais transformer cette opportunité en revenus pour ma famille.”
Au total, 60 femmes ont été formées à la fabrication de briquettes écologiques, contribuant ainsi à leur autonomie tout en luttant contre la déforestation et les violences basées sur le genre. Ces briquettes, à bas prix, ne polluent pas l’environnement et aident à réduire les déchets en ville.
Daniel Musafiri a ajouté que l’agriculture dans ce milieu volcanique et gazeux présente de nombreux risques et a appelé les agriculteurs à prendre en compte tous les aléas du changement climatique.