
Par Denise KYALWAHI
À Belém, les négociations de la COP30 avancent dans un climat contrasté. Alors que des progrès étaient attendus sur la définition d’indicateurs d’adaptation, les divergences s’accentuent. Dans le même temps, une nouvelle dynamique internationale se renforce pour tracer une feuille de route mondiale de sortie des énergies fossiles.
Les pays africains et arabes demandent un report face à l’adaptation, faute de financements garantis. L’un des résultats les plus anticipés de cette COP30 concernait l’adoption d’indicateurs permettant aux États de mesurer leurs progrès en matière d’adaptation climatique. Mais un projet de texte récent révèle une fracture persistante : les pays africains et arabes réclament un report de deux ans, jusqu’en 2027.
Selon Richard Muyungi, président du Groupe africain des négociateurs (AGN), cité par Climate Home News, cette position s’explique avant tout par l’insuffisance des financements internationaux promis par les pays développés. Les propositions actuelles comptabilisent les efforts financés par les budgets nationaux, une approche jugée inéquitable par les pays à faibles revenus.
L’AGN préconise de poursuivre les discussions pendant deux années supplémentaires afin d’élaborer des indicateurs plus réalistes et adaptés aux capacités des pays du Sud. Ce ralentissement, sur un dossier initialement jugé consensuel, pourrait freiner l’ambition du Brésil de faire de cette COP la « COP de l’adaptation ».
Pour Teresa Anderson, responsable mondiale de la justice climatique chez ActionAid International :
« Rien ne garantit aujourd’hui que les ressources nécessaires seront disponibles pour mettre en œuvre les mesures d’adaptation envisagées. Les pays africains ont de bonnes raisons de ne pas se précipiter. »
Transition énergétique : une vaste coalition soutient la feuille de route mondiale de sortie des énergies fossiles

En parallèle, une dynamique plus positive s’installe. Dès l’ouverture de la conférence, le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva a appelé à l’élaboration d’une feuille de route internationale visant à réduire progressivement l’usage des combustibles fossiles.
Cet appel a rapidement trouvé un écho favorable. Des ministres du Brésil, du Royaume-Uni et de l’Allemagne ont lancé à Belém une initiative commune pour faire avancer cette proposition.
Plusieurs pays – dont le Danemark, la Colombie, le Kenya, la France et les îles Marshall – ont immédiatement exprimé leur soutien. Le groupe Environmental Integrity Group, composé notamment du Mexique, de la Corée du Sud et de la Suisse, s’est également joint à cette dynamique.
La ministre brésilienne de l’Environnement, Marina Silva, figure centrale de ce mouvement, a rappelé lors d’un événement parallèle :
« Nous avons besoin d’une boussole pour guider le monde hors de sa dépendance aux énergies fossiles. »
Le défi reste désormais de rallier davantage de pays afin d’intégrer cette initiative au paquet final de la COP30, malgré son absence dans l’agenda officiel.
Un rappel urgent : la trajectoire actuelle de réchauffement reste critique. Cette mobilisation en faveur de la transition énergétique est renforcée par les dernières analyses de Climate Action Tracker (CAT). Leurs données 2025 révèlent que les nouveaux plans climatiques ne modifient presque pas la trajectoire mondiale : le monde se dirige toujours vers 2,6 °C de réchauffement d’ici 2100.
Bien que cette prévision soit meilleure qu’il y a dix ans (3,6 °C), elle reste largement supérieure aux objectifs de l’Accord de Paris. Pour les experts, une transition rapide et structurée hors des combustibles fossiles est indispensable.
La COP30, une Cop sous pression entre ambitions et réalités
Entre les blocages persistants sur l’adaptation faute de financements clairs – et l’enthousiasme croissant pour une transition énergétique globale, la COP30 illustre les tensions profondes qui traversent les négociations climatiques.
Le sommet devra trouver un équilibre entre ambitions politiques, capacités financières et responsabilités historiques afin d’éviter une nouvelle déception climatique.
