Santé: Pourquoi l’intégration de l’éducation sexuelle dans le programme scolaire suscite des réactions en RDC?

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L’enjeu est de taille et d’actualité: L’intégration de la composante « santé de la reproduction et droits reproductifs » dans le Programme national des branches spécifiques de l’enseignement spécial en RDC est sur la table des gestionnaires du ministère de l’éducation nationale… Pour nombreux, la démarche se justifie. Pour d’autres en outre, parler de la sexualité aux enfants et jeunes en âge scolaire, c’est un couloir leur ouvert vers la débauche… Mais qui dit mieux ?

La RDC est l’un des pays où l’on rapporte plus de cas de grosses non désirées. Le fonds des Nations unies pour la population UNFPA note sans en préciser les statistiques, que le pays renferme << un taux élevé des grossesses non désirées >>.

C’est une, selon plusieurs spécialistes en santé sexuelle, des conséquences d’un non accès des jeunes adolescents à l’éducation sexuelle d’une part, et des difficultés << d’accès des adolescents et jeunes aux services de santé sexuelle et reproductive de qualité >>, de l’autre.

En ce sens, le Plan stratégique pour la santé et le bien être des adolescents établi par le gouvernement Congolais cité par l’organisation mondiale de la santé OMS, mentionne que seuls 17 % des jeunes et adolescents ont accédé aux services de santé en RDC, selon le logiciel DHIS2 en 2021, sur les 32,8% des jeunes d’entre 10 et 24 ans attendus d’ici 2025.

Comment y faire face ?

C’est un grand défi qu’il importe de relever le plus vite possible. Et l’éducation sexuelle s’affiche aujourd’hui comme une alternative innovante et à la fois opportune, pour y répondre.

Edcan Network, note à ce sujet que << l’éducation sexuelle, scolaire, vise notamment à enseigner aux jeunes la santé reproductive tout en expliquant les risques liés aux pratiques sexuelles (maladies sexuellement transmissibles, à une grossesse non désirée, aux violences sexuelles) et à les informer sur des pratiques sûres et à dédramatiser les angoisses…>>.

En outre, pendant qu’au niveau scolaire l’on met un accent sur l’éducation sexuelle, dans les familles l’on doit orienter une attention sur le planning familial. Car UNFPA rapporte en RDC, << un taux élevé des besoins en planification familiale, soit 27% et des normes sociales dans certains endroits qui encouragent la fécondité…>>.

Éducation sexuelle, un besoin pour la RDC…

Le fonds des Nations unies pour l’enfance UNICEF, faisait croire en 2020, que le nombre d’enfants scolarisables âgés de 6 à 11 ans était estimé à environ 15,5 millions. Ces enfants, ne sont néanmoins pas sans problèmes. Nombreux ont des problèmes notamment auditif et visuel, mais aussi de manque d’informations sur la santé sexuelle et reproductive. Et à ce niveau, la nécessité d’éduquer les enfants sur les matières sexuelles s’affiche comme un impératif.

En 2006 en Suisse, le gouvernement (Protection de l’enfance) a lancé un programme dit << Parcours-découverte « Mon corps est à moi ! » …>>! Ce programme qui consistait en une exposition interactive, avait pour objectif, << d’inciter les élèves à réfléchir aux messages sur la prévention de la violence sexuelle, dans une démarche ludique >>.

Et dans un contexte actuel de la RDC, le Docteur John MUZIGE pense que pareil programme vaut son pesant au pays. Médecin coordonnateur provincial du programme national « santé de la reproduction au Nord Kivu », John MUZIGE défend qu’il << est donc important d’intégrer la composante santé de la reproduction et des droits reproductifs dans le programme national scolaire…>>.

Les enjeux éducatifs évoluant, le ministère de l’enseignement primaire et secondaire en République Démocratique du Congo, réfléchit sur comment matérialiser un tel vœu, vu son impact sur l’avenir des enfants. Et le Docteur John MUZIGE dit en être d’accord : << J’encourage l’initiative du gouvernement visant à intégrer les questions de santé sexuelle dans les programmes d’éducation scolaire. Car la santé sexuelle concerne toute personne identifiée avec un sexe. les élèves étant plus concernés par cette matière, il est impérieux d’intégrer à tous les niveaux et à différentes tranches d’âges la santé sexuelle et reproductive; pour les épargner de plusieurs conséquences néfastes qui sont les grossesses non désirées, les maladies sexuellement transmissibles, les mutilations génitales,… C’est aussi une façon de préparer la jeunesse à la sexualité responsable >>, Poursuit -il.

Chef des travaux, enseignant et président provincial du Syndicat National des écoles conventionnées Protestantes SYNEP/Nord-Kivu, Patient Rafiki abonde également dans le même sens que MUZIGE.

Pour lui, parler de l’éducation sexuelle aux apprenants, << permettra aux enfants d’être informés de toutes les conséquences possibles autour de la sexualité…>> et cela devra << les protéger et briser la curiosité chez tous ces enfants qui veulent puiser des informations en rapport avec la sexualité en dehors du milieu éducatif et familial…>>.

Que pensent les parents ?

Leurs avis au sujet de cette question sont partagés. Certains pensent que ce programme << vient pour briser le silence vis-à-vis de leurs enfants en ce qui concerne le dialogue social sur l’éducation sexuelle >>.

<< Souvent, je trouve une occasion de parler de la sexualité à mes enfants quand ils me parlent de la matière en rapport avec la sexualité apprise à l’école >>, explique JEAN BWAMI, père de 4 enfants.

En revanche, la sexualité n’a cessé d’être un tabou pour une autre catégorie des parents. Et parler de la sexualité aux enfants est une << incitation à la vie de débauche >>, oppose Madame CECILE NYEMBO, mère de 7 enfants. Elle explique que << parler de la sexualité à mes enfants c’est les inciter à avoir une vie sexuelle Intense et non contrôlée pour finir à la débauche >>.

Père d’un seul enfant, Moïse KASOMO pense par contre qu’aujourd’hui, la société a suffisamment évolué que rien ne peut plus être perçu comme un tabou. << Même si nous pouvons ne pas en parler, les enfants d’aujourd’hui découvrent la sexualité dans les réseaux sociaux. Et pour éviter qu’elle les affecte et ruine leur avenir, c’est mieux qu’on leur en parle en famille, à l’école, partout,… ça peut leur permettre de cultiver un comportement responsable. Car, tenez, l’expérience que j’ai, en tant que jeune parent qui vient fraîchement du célibat, c’est que, une sexualité mal contrôlée est un gâchis pour toute une vie…>>, insiste-t-il.

L’enjeu de l’éducation sexuelle a évolué et intéresse maintenant de plus en plus la société contemporaine. Du 22 au 28 Mai 2023, la cité de Mbanza-Ngungu, en province du Kongo Central, a abrité un atelier de haut niveau rassemblant des cadres de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique (EPST) et des experts venus de plusieurs structures éducatives, pour réfléchir autour de l’intégration de la composante « santé de la reproduction et droits reproductifs » dans le Programme national des branches spécifiques de l’enseignement spécial, en République Démocratique du Congo.

Sarah MULEKYA et John TSONGO

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